Différencier un salarié d’un indépendant devient de plus en plus crucial. Pourtant cela reste complexe. Une chose est sûre : les plateformes numériques ne sont pas le bon filtre.
Salariat = subordination
LE distinguo qui fait qu’un travailleur est un salarié est le fait qu’il « est soumis à la volonté et au contrôle » d’un employeur. Les résultats de son travail et les moyens d’y arriver ne dépendent pas de lui.
Pour savoir si un lien de subordination existe, une loi de 2006 prévoit 4 critères principaux :
- la volonté des parties ;
- la liberté d’organiser le travail ;
- la liberté d’organiser le temps de travail ;
- la possibilité d’exercer un contrôle hiérarchique.
Parmi ces critères, la primauté va à la volonté des parties. Si les parties ont signé un contrat de travail, c’est seulement si les faits montrent clairement l’absence de subordination que la relation de travail sera requalifiée en relation entre indépendants. Et c’est bien là le but de cette législation. Détecter les « faux indépendants » et les « faux salariés ».
Davantage de critères, moins de clarté
Depuis 2012, la législation a ouvert la porte à la multiplication de ces critères dans certains secteurs (construction, gardiennage, transport, nettoyage). Ceci était supposé permettre de mieux combattre la grande fraude sociale organisée.
Malheureusement, comme le constate le Conseil supérieur des indépendants et des PME (CSIPME), cette législation n’est pas efficace pour combattre la fraude sociale transfrontalière puisqu’elle n’a aucun impact sur la concurrence déloyale dont l’origine se trouve à l’étranger tels que les « faux-indépendants » étrangers qui tombent sous le système de la sécurité sociale de leur pays d’origine.
De plus, la multiplication de critères a amené un flou qui complique l’analyse des situations. Ceci n’est dans l’intérêt de personne.
Pour nous, réformer la Loi pour revenir à un nombre limité de critères clairs est une nécessité.
Tout n’est néanmoins pas à jeter à la poubelle : la volonté des parties devrait en effet se concrétiser par une liberté de négocier le prix des prestations, par le fait pour l’indépendant de se comporter comme une vraie entreprise distincte, par le fait pour le client ou donneur d’ordre de ne pas contrôler l’organisation du travail, …
Distinguer grâce aux plateformes? Non!
Le débat connaît une vigueur nouvelle ces derniers temps car l’actuel gouvernement s’est donné pour mission d’apporter de la clarté aux prestataires de l’économie de plateformes.
Sans même entrer dans le débat compliqué du statut de ces prestataires, on peut déjà dire que le passage par une plateforme numérique ne peut pas être un critère pertinent pour distinguer un salarié d’un indépendant.
Pour la simple raison que les situations sont extrêmement variables d’une plateforme à l’autre. Certaines plateformes encadrent largement la prestation (moment, durée, tarif, …). D’autres mettent uniquement en relation des personnes avec des prestataires en leur laissant la possibilité d’arranger la prestation comme ils l’entendent.
Les plateformes sont un outil. Changer de statut au prétexte qu’on change d’outil est un non-sens. Et priver les entrepreneurs de cette manière de promouvoir leurs activités ne sera certainement pas de nature à aider au développement de ce business model.
Or notre enjeu est bien celui-là. Promouvoir la volonté d’entreprendre. Quel que soit le moyen !
Plus d’infos : La régulation des plateformes numériques