Rendre les pensions des indépendants plus équitables, c’est-à-dire plus élevées. C’est la priorité des indépendants et donc la nôtre. Un avis important vient confirmer notre position : oui, c’est faisable et SANS augmentation des cotisations sociales. Explications.
À l’heure actuelle, pour 1 € de cotisation investi dans sa pension, l’indépendant reçoit 1,49 € en retour, pour 2,60 € pour un salarié. Comment rééquilibrer les choses ? En supprimant le « coefficient de correction » qui affecte le calcul de la pension des seuls indépendants.
C’est ce qui avait déjà été démontré par UCM en 2017-2018 dans son étude sur la « rentabilité des cotisations sociales en matière de pensions chez les indépendants et chez les salariés ». Les différences de rentabilité sont énormes. Cette étude concluait sur la nécessité et le caractère justifié d’une suppression pure et simple du coefficient.
Des pensions d’indépendant rabotées de 34 %
Le coefficient de correction est aujourd’hui de 0,66 (et 0,54 sur les plus hautes tranches de revenus). Il a été historiquement établi en tenant compte des taux de cotisation entre indépendants et salariés.
Aujourd’hui, avec un taux de cotisation de 20,5 %, un indépendant cotise certes globalement moins que le salarié et son employeur (13,05 % + 25 %), mais il y a lieu de tenir compte d’autres facteurs :
- L’indépendant met la priorité sur la couverture pension : il investit en réalité plus de la moitié de ses cotisations dans son volet « pension » (54 %, pour seulement 36 % dans le régime salarié).
- Aussi – et c’est fondamental -, du côté indépendant, le niveau réel de cotisation est plus élevé : les années « cotisées » représentent 96 % des années retenues pour la carrière. Du côté salarié, un tiers de la carrière est constituée de périodes assimilées, donc de périodes « gratuites » non cotisées.
- En outre, le régime des salariés connaît bon nombre de réductions de cotisations sans impact négatif sur les droits à la pension.
Le coefficient doit donc être revu pour tenir compte de ces différences. En fait, il doit être supprimé. Ce qui permettra aux pensions d’indépendant d’être davantage proportionnelles jusqu’au même niveau maximum de 2.400 € que pour les pensions actuelles des salariés. Aujourd’hui côté indépendants, le maximum est à 1.600 €.
Le Comité général de gestion pour le Statut social des Travailleurs indépendants est l’équivalent pour les indépendants du Conseil national du travail pour les salariés. Ce sont des avis qui comptent. Ce 24 avril 2019, ce comité fédéral, où siège UCM, a adopté un avis qui confirme le caractère justifié de cette suppression.
Les pensions des indépendants alignées demain sur celles des salariés? @lalibrebe #independants #pensions #inasti @SPFSecu @UCMMouvement @UNIZOvzw https://t.co/mo0eqH2rl3
— François Mathieu (@FraMathieu) 29 avril 2019
Par trois méthodes différentes (réactualisation des paramètres, étude macro-budgétaire, étude micro développée par UCM), le comité y établit que les coefficients actuels ne sont plus justifiés et que leur suppression s’impose.
Le comité a également estimé le coût de cette mesure de suppression. Ce coût est inférieur au niveau des bonis du statut social (bonis supérieurs à 300 millions € ces trois dernières années). En d’autres mots, la mesure est « finançable » sans augmentation des cotisations sociales.
Un premier pas dès 2020
Dans le cadre de l’accord interprofessionnel (plus précisément dans la répartition des enveloppes bien-être), les représentants des indépendants au Groupe des 10 – UCM et Unizo donc – ont demandé au gouvernement de faire un premier pas dans cette direction. Comment ? En investissant 6 millions d’€ pour que le coefficient passe de 0,66 à 0,69. Objectif : atteindre un coefficient de 1,… En d’autres mots, la suppression du coefficient.
C’est chose faite, la loi portant mise en oeuvre du l’AIP a été adoptée ce 24 avril 2019. C’est donc une date clef dans ce dossier ! Le coefficient passera à 0,69 pour les années de carrière à partir de l’année 2019.
UCM a placé l’augmentation du coefficient à 1,00 (soit la suppression dudit coefficient) dans ses cinq priorités pour la prochaine législature. Tout est en place, y compris sur le plan budgétaire et financier, pour que ce dossier puisse avancer rapidement dans les prochains mois. Vous l’aurez compris, en termes de statut social, UCM en fait son principal combat.
L'auteur.e de cet article
- La sécurité sociale des travailleurs indépendants reste un levier important pour développer l'entreprenariat. J'écris ici, avec le Service d'Etudes, pour défendre les intérêts des indépendants en matière de pensions, de droit passerelle, d'assurance maladie-invalidité,... N'hésitez pas à réagir et à commenter.
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Et quelle mesure pour optimiser / rétribuer les cotisations de tous les indépendants à titre complémentaire.?
Le non retour sur nos cotisations nous bride dans notre expansion et pour certains incite au travail en noir
Monsieur Baquet,
La situation des indépendants à titre complémentaire en matière de pensions est problématique et – pour certains d’entre eux* – injuste et inacceptable. Merci pour votre réaction.
Force est de constater que les nombreux groupes de travail auxquels nous avons participé n’ont jusqu’ici pas abouti sur ce thème. Les systèmes actuels de pension (tant vantés) ne sont pas adaptés à l’intégration de cotisations faibles auxquelles il faudrait attacher des petits droits de pension complémentaires. Ils constituent un frein majeur : contourner lesdits systèmes (trois régimes de pension très rigides) revient à mettre en œuvre des usines à gaz coûteuses, le coût de mise en œuvre s’ajoutant au coût des nouvelles dépenses en termes de pensions.
Aujourd’hui, UCM continue de prôner la recherche d’une solution et a placé dans son mémorandum 2019-2024 (lu et suivi avec une très grande attention par les partis de tous bords) non seulement une demande pour maintenir et renforcer les aides pour le passage vers une activité indépendante à titre principal (type mesure Airbag), mais aussi une demande très claire en pensions :
« L’UCM demande que les cotisations sociales des travailleurs indépendants à titre complémentaire soient valorisées dans le régime indépendant au prorata des sommes versées, et ce en complément à la pension dont les intéressés bénéficient dans le régime général ou le régime des fonctionnaires. La mise en oeuvre de cette mesure sera grandement facilitée par le passage à un système de pension par points. » [Demandez copie de notre mémorandum via la page https://www.ucmvoice.be/2019/03/22/250-propositions-pour-changer-le-quotidien-des-entrepreneurs/ ]
Et nous pouvons raisonnablement penser que cette demande sera inscrite dans le prochain accord de gouvernement fédéral, tout comme – nous sommes une des rares organisations à soutenir cette voie très rationnelle vers plus de transparence et de simplicité – notre demande d’aboutir avec un système de type « système de pension à points ».
Notre mesure phare sur la suppression du coefficient de correction (amélioration de la proportionnalité des pensions d’indépendants) va aussi impacter positivement les droits de pension de ceux des entrepreneurs qui débutent à titre complémentaire. Tout est dans tout.
Merci en tous les cas de nous suivre sur le blog, et j’espère pouvoir y revenir dans un prochain article avec des bonnes nouvelles sur les effets des actions d’UCM.
Renaud Francart
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(*) C’est principalement lorsque l’indépendant complémentaire cotise sur la base d’un revenu annuel net inférieur à 13.847 € que ses cotisations ne lui ouvrent aucun droit de pension, ce que vous dénoncez légitimement. Dans ce cas, l’individu ne bénéficie que d’une pension éventuellement partielle dans le régime salarié, sans complément lié à ses cotisations versées dans le régime des indépendants. Important : dès que votre revenu dépasse 13.847 euros, vos cotisations « à titre complémentaire » sont prises en compte, génèrent des droits de pension parfois de manière très avantageuse. La problématique est ici aussi celle du « tout ou rien » selon le revenu.