Une nouvelle directive a été prise au niveau européen. Elle traite d’égalité salariale et concerne tous les employeurs. Elle doit entrer dans notre droit pour 2026. Ça laisse du temps pour discuter. Et il en faudra !
Objectif louable
Cette directive vise à éliminer les différences de salaire basées sur la différence homme-femme. L’outil utilisé est la transparence.
En effet selon la Commission Européenne, le manque de transparence des rémunérations est l’un des principaux obstacles à la réduction de l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, qui se maintient à environ 13 % en moyenne dans l’UE en 2020. Cela signifie que les femmes gagnent en moyenne 13 % de moins que les hommes par heure (données Eurostat de 2021).
Notons d’emblée que la Belgique fait figure de très bon élève en cette matière. Nous sommes le pays de l’OCDE qui connait la différence la plus mince entre homme et femme. La moyenne des pays de l’OCDE se situe à 12.1%. La Belgique est à 1.2%. Ceci ne voulant pas dire que nous devons nous satisfaire de cette différence minime !
A cet égard, les objectifs de la directive vont dans le bon sens. Il est toutefois possible de se questionner sur les méthodes utilisées.
Pas la boite de Pandore
Coupons d’abord les ailes à un canard. Cette directive n’impose pas aux entreprises de divulguer largement les salaires de leurs collaborateurs. Pas questions ici de donner un libre accès aux salariés dans les données de paie de leurs collègues.
Mais cette nouvelle directive contient des règles qui ne laisseront pas les dirigeants de PME indifférents.
Cadre visible
La première obligation que cette directive pose à toutes les entreprises est celle de faire la clarté sur sa politique salariale que ce soit à destination des travailleurs déjà en place ou à destination des candidats.
Il s’agira donc pour tous les employeurs d’être en capacité de montrer les critères objectifs qui ont servi à déterminer la rémunération en lien avec les postes de travail qu’ils proposent. Ces critères pourront être ceux dont se servent les secteurs pour établir leurs barèmes.
La directive crée d’ailleurs un droit pour les travailleurs de demander et de recevoir les informations pertinentes à cet égard.
Rapportage
En plus de cette obligation d’information, la directive crée une obligation de rapportage sur les salaires qui sont pratiqués pour les hommes et les femmes dans les entreprises.
Ce rapportage doit mener à des évaluations conjointe (syndicats et patrons) de la politique salariale des entreprises.
Toutefois, cette obligation de rapportage ne s’impose que pour les entreprises qui ont plus de 100 travailleurs.
Inversion de de la charge de la preuve
Les droits instaurés par la directive doivent être susceptibles de recours : tous les travailleurs (pu leurs syndicats) qui s’estiment lésés par un défaut d’application du principe de l’égalité des rémunérations doivent avoir accès à des procédures judiciaires facilement accessibles, même après la fin de la relation de travail.
Et ce n’est pas tout, la directive impose qu’en cas de recours contre l’employeur, il LUI incombe de prouver qu’il n’y a pas eu discrimination directe ou indirecte en matière de rémunération.
Sanctions
La directive impose de prévoir des sanctions contre les employeurs qui violeraient, ses dispositions… ou qui ne pourraient pas prouver le contraire !
La règle crée aussi nouvelle protection contre le licenciement. Tout travailleurs qui se plaindrait en invoquant cette règlementation ne pourrait être licencié, au risque de lourdes sanctions financières pour l’employeur.
Position UCM
UCM estime que rémunérer différemment les hommes et les femmes pour un travail identique est inacceptable, quel que soit leur statut (les indépendant(e)s ne sont toutefois pas concernées par cette directive). Mais il faut être de bon compte. Présupposer que toute différence de salaire entre hommes et femmes est due à une décision des employeurs est déloyal.
Par ailleurs on l’a dit, l’objectif poursuivi par cette directive est louable. Il importe toutefois de ne pas dépasser les bornes. Lorsqu’il est question de restaurer une inégalité supposée entre hommes et femmes, c’est bien à cela et à cela uniquement qu’il faut s’atteler. La transposition de cette directive ne peut donc servir d’occasion pour imposer l’ouverture totale et publique des politiques salariales des entreprises.
Enfin, la directive le dit elle-même, la mise en œuvre des règles posées ne doit pas contrarier la création et le développement de micro, petites ou moyennes entreprises. La directive doit être transposée pour 2026. Ceci nous laisse 2 ans pour discuter entre partenaires sociaux de ce que doit être la vision belge de cette directive