Maintenir l’informatique de l’administration au top niveau est très positif. Mais ceci ne peut se faire au détriment des intérêts légitimes des employeurs.
Un projet très ambitieux
Le 11 juillet dernier, l’ONSS a présenté son rapport annuel 2023. L’office a mis en avant un important projet de digitalisation de ses services baptisé « e-gov 3.0 ».
Le projet e-Gov 3.0 de l’Office National de Sécurité Sociale (ONSS) vise à moderniser et optimiser les services publics en utilisant les technologies numériques avancées. Ce projet ambitionne de simplifier les démarches administratives pour les citoyens et les entreprises, en offrant des services plus accessibles, rapides et efficaces. Ce processus s’étend dans le temps. Les premières « pierres » sont déjà posées. On vise un changement complet d’ici fin 2027.
Cette nouvelle manière de penser les relations entre l’ONSS et ses parties prenantes repose sur une modification fondamentale de la philosophie qui présidait jusqu’alors au transfert des données sociales.
Plutôt que d’envoyer des données à l’ONSS et de lui en demander en retour, tous les acteurs déposeront les données qu’ils possèdent au même « endroit », ce qui permettra de les mettre à la disposition des autres. Ceci simplifiera le travail des administrations pour, par exemple, calculer l’indemnité « mutuelle » d’un travailleur malade. Mais surtout, les employeurs auront accès à davantage de données. Par exemple pour connaître l’état du droit aux vacances d’un nouvel engagé, il ne faudra plus avoir recours au mécanisme incertain et archaïque de l’« attestation de vacances ». Ceci donnera également aux indépendants davantage de visibilités sur leurs droits, de pension notamment.
Cette évolution technique va donc dans le sens de l’Histoire et on ne peut qu’applaudir à l’idée que les administrations de la sécurité sociale soit si consciente de l’enjeu de la transition digitale.
Oui, mais …
L’usager d’abord
Rassembler des montagnes de données au même « endroit », c’est sans doute très utile mais cela pose quand même des questions importantes. La première d’entre elle est évidement celle de la sécurisation de l’accès à ces données. Il nous faut l’assurance que ces données seront correctement protégées des cyberattaques.
Mais notre préoccupation principale est de nous assurer que ce dispositif est bien mis en place pour simplifier la vie des usagers, et donc aussi des employeurs et de leurs secrétariats sociaux. Si tout l’enjeu est de faciliter la vie des administrations sans gains pour les employeurs, il ne faudra pas compter sur nous. On pense ici aux autorités de contrôle dont l’accès aux données devra être très strictement encadré. Pas question de mettre en place un « big serveur » informatique, soi-disant bienveillant mais dont la finalité aurait tout d’un piège.
Pour toutes ces raisons, les acteurs de la concertation sociale insistent pour être au pilotage de ce processus.
La concertation sociale aux commandes
C’est ainsi qu’au Conseil National du travail les partenaires sociaux ont mis en avant le fait qu’il reste fondamental que ce projet n’entraine pas de modification des rôles des corps intermédiaires. Les pilotes de la sécurité sociale, ce sont les employeurs et les travailleurs. Il est donc indispensable que les représentants des employeurs, notamment ceux des PME, soient à tout moment en capacité d’orienter les travaux des techniciens informatiques de l’ONSS dont les compétences sont si élevées qu’ils risquent de perdre de vue une considération aussi prosaïque qu’incontournable : si les indépendants et les chefs de PME n’y trouvent pas leurs comptes, ce projet sera un échec.