Après plusieurs semaines (et quelques nuits) de négociation, le Gouvernement fédéral s’est accordé in extremis sur un budget pour 2023 et 2024. Quel impact pour les employeurs de PME ?
Compenser l’indexation
Le premier défi du Gouvernement était le problème de l’indexation des salaires. Avec cinq indexations en 2022 dans certains secteurs, et quasi 11% d’indexation attendus en commission paritaire 200, il fallait faire quelque chose. Sans quoi, nous l’avions montré, on courrait à la catastrophe.
Alors oui, un volet de l’accord traite de compensation de l’indexation. Il est question de réduire les cotisations patronales durant (seulement) les 2 premiers trimestres de 2023. Mais pour les détails, c’est plus flou. On sait qu’une réduction de 7.07% sera appliquée sur les cotisations ONSS mais on ignore si cette réduction touchera toutes les cotisations patronales ou seulement la cotisation patronale principale. Or l’amplitude de l’aide est un point essentiel pour nous ! Les évaluations et les calculs sont donc encore en cours… mais à ce stade, on craint que cette réduction ne compense pas l’augmentation de coût salarial générée par l’indexation.
C’est une appréciation en demi-teinte pour cette mesure (à ce stade en tout cas) mais nous continuons à en discuter.
Flexibilité en vue sur le marché du travail
L’accord mentionne clairement que le Gouvernement continuera à œuvrer pour relever le taux d’emploi et encourager la mobilité interrégionale du travail. Les réformes structurelles (pourtant nécessaires) du marché du travail sont donc promises mais, malheureusement, elles ne sont pas encore là !
En guise d’apéritif, il est tout de même déjà acquis que le système des flexi-jobs sera ouvert à de nouveaux secteurs (notamment le secteur évènementiel, les parcs et les jardins). Cependant, nous sommes déjà au travail pour élargir encore les possibilités de flexi-jobs.
L’accord contient aussi l’élargissement du régime ONSS particulier au travail des étudiants (de 475 heures à 600 heures).
Prolongation du chômage temporaire « énergie »
A peine créé, le chômage économique spécifique à la crise énergétique (limité au départ à fin 2022) est prolongé jusqu’à la fin du premier trimestre 2023. On l’a dit, ce n’est malheureusement pas le même régime que le chômage « corona » mais c’est déjà ça !
Points noirs
Certains points de l’accord sont plus inquiétants. On pointe le fait que le délai de prescription en matière de sécurité sociale va passer de 7 à 10 ans. Ceci ouvre plus grand la porte à des contrôles, justifiés dans certains cas, mais parfois « tatillons ».
On pointera aussi la création d’une amende pure et simple visant à dégouter encore davantage les employeurs du mécanisme de rupture pour force majeure médicale, alors qu’il est clair que ce dispositif permet de débloquer des situations et que les salariés sont souvent eux-mêmes demandeurs.
Entrée en vigueur
L’accord complet fait 105 pages… difficile de tout détailler. Mais une chose est certaine : à ce jour, tout ceci relève de l’accord politique. Avant d’entrer dans le corpus législatif, plusieurs étapes sont nécessaires. Validation finale au Gouvernement, consultation des partenaires sociaux, parcours parlementaire complet (commission, puis plénière), sanction Royale puis, enfin, publication.
2022 ne fera donc pas exception. Nous aurons à nouveau de vastes lois « programmes » ou « portant des dispositions diverses » votées tard dans la nuit juste avant d’entrer en vigueur en janvier. Des textes « tutti frutti » qui horrifient les juristes et qui semblent rendre la pareille au Gouvernement et à ses accords d’après nuits blanches.
L'auteur.e de cet article
- Matthieu DEWEVRE