Conjoints aidants, carrières mixtes non prises en compte… Avant même de parler de réformes, il faut immédiatement corriger les exclusions injustes. Explications.
Des travailleurs indépendants, même avec une carrière très longue, ne bénéficient pas de la pension minimum. Ce sont certaines situations dénoncées par le Médiateur des Pensions depuis plus de 10 ans, qui attendent toujours d’être corrigées.
La pension minimum, c’est un mécanisme de solidarité au sein de la Sécurité sociale. Il garantit, même aux plus petits cotisants, un montant minimum de pension de retraite. Les règles sont les suivantes :
- un niveau minimum est aujourd’hui fixée à 1.352 euros pour un isolé ;
- On tendra vers 1.500 euros d’ici 2024 ;
- Elle n’est néanmoins octroyée qu’au pro rata de la carrière. Par exemple : 1.202 euros en cas de carrière de 40 ans (soit donc 40/45e de 1.352 euros) ;
- Dernière règle mise en débat ces derniers jours : elle n’est accordée que si la carrière professionnelle du bénéficiaire est globalement d’au moins 30 ans.
Par « carrière globalement d’au moins 30 ans », on entend « en tenant compte de la carrière de salarié, de la carrière d’indépendant et, en général, de la carrière cotisée dans un régime de pension européen ».
Avant tout corriger la situation des carrières mixtes « OSSOM »
C’est effectivement bien cette « condition de carrière » qui doit être corrigée. Actuellement, la carrière dans la fonction publique et celle cotisée à l’OSSOM (sécurité sociale belge d’Outre-mer) ne sont pas prises en compte pour la condition de carrière de 30 ans.
« Le Collège des médiateurs pour les pensions a déjà pointé, il y a quelques années (ndlr, rapport 2009 du Médiateur des pensions), ce que l’on peut considérer comme une lacune législative. Toutefois, et nous le constatons à regret, les autorités politiques n’ont pas estimé opportun, plus de 10 ans plus tard, de revoir les règles établies en matière de pensions minimums », Jean-Marie Hanesse et T. Van der Steen, médiateurs.
Résultat des courses : cette année, encore, un indépendant actif durant 27 ans à l’étranger sous le régime OSSOM qui, pour les 18 années cotisées ensuite dans le régime des pensions des indépendants, bénéficiera de 238 euros mensuels. Oui, 238 euros pour 18 années de cotisations, malgré une carrière complète !
Au total, avec sa pension OSSOM de 999 euros, il bénéficie d’une pension inférieure au minimum : 1.237 euros au lieu de bientôt 1.500.
La loi doit être modifiée, pour la prise en compte de la carrière OSSOM et de la carrière dans la fonction publique. C’est une question évidente d’équité. Il n’est jamais trop tard.
Ensuite corriger la situation des « conjoints aidants »
En effet, la situation est identique pour les conjoints aidants. Pour rappel, les conjoints d’indépendants – qui apportent leur aide dans l’activité professionnelle – étaient exclus purement et simplement de la Sécu jusqu’en 2003, année durant laquelle un système volontaire de cotisation pour la pension était mis sur pied. En 2005, les cotisations sont devenues obligatoires.
Comment prouver en 2021 une carrière d’au moins 30 ans dans un statut créé en 2003 ? Là aussi, une correction est attendue très rapidement. La condition actuelle est d’avoir, au moins, cotisé deux tiers de la période maximale (soit 12 années sur les 18 possibles).
La loi doit être corrigée.
Enfin s’atteler aux réformes et à la question des années travaillées
Un débat a vu le jour tout récemment sur la question suivante entre des partis de la majorité fédérale : est-il normal, socialement acceptable, raisonnable, que l’on prenne en compte de la même façon trente années de carrière travaillées ET trente années dites assimilées (couvertes par le chômage ou l’invalidité) ? Cette question est légitime.
Mais UCM, comme d’autres organisations représentatives des travailleurs, des employeurs et des indépendants, reste dans l’attente de débuter les travaux en matière de réformes des pensions. La question d’une éventuelle révision des conditions de la pension minimum doit venir sur la table de ces travaux. Et les réponses dépendront d’un ensemble de réformes cohérentes.
Madame Lalieux, Monsieur Clarinval, nous attendons l’invitation.
L'auteur.e de cet article
- La sécurité sociale des travailleurs indépendants reste un levier important pour développer l'entreprenariat. J'écris ici, avec le Service d'Etudes, pour défendre les intérêts des indépendants en matière de pensions, de droit passerelle, d'assurance maladie-invalidité,... N'hésitez pas à réagir et à commenter.
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