Un avis est tombé. Les livreurs DELIVEROO peuvent être considérés comme des salariés. Le seront-ils ? Bonne question !
L’avis en question vient de la commission administrative de règlement de la relation de travail. Cette commission est composée exclusivement de fonctionnaires provenant du SPF emploi, du SPF sécurité sociale, de l’Inasti et de l’ONSS. Elle peut être saisie par toute personne qui a un doute sur sa relation de collaboration. Il faut que la relation en question ait commencé depuis moins d’un an et ne soit pas clôturée.
Cette procédure administrative souffre de sévères lacunes. D’abord elle est unilatérale. La commission n’entend pas nécessairement l’autre partie. De plus la procédure est restrictive, elle ne se base que sur les (extraits de) documents qui lui sont soumis par le demandeur. Enfin ses effets sont limités à la situation particulière qui est portée devant la commission.
Pas sûr donc que cet avis sera suivi d’effet, notamment pour convaincre les juges.
Par ailleurs, du côté de DELIVEROO, on a clairement indiqué que le souhait était de travailler avec des livreurs indépendants. On ne voit pas ce qui empêcherait cette entreprise de modifier ses contrats pour les faire correspondre à sa volonté. D’ailleurs, ça n’a rien de dramatique, bien au contraire !
Il y a finalement deux lectures possibles de la situation.
Positivement
Il est temps que certains se rendent compte que le statut d’indépendant a tout son intérêt, hors de la simple négation du statut de salarié. Il ouvre des droits à une vraie protection sociale. Il évolue et il a ses défenseurs (relais politiques), l’UCM en tête. La caricature du livreur indépendant vu comme « un oiseau pour le chat » ne tient pas debout.
Ceci n’implique pas que la situation monopolistique de DELIVEROO n’entraîne aucune forme d’abus.
Si abus il y a, il faut les combattre par une réglementation économique plus attentive à la situation des travailleurs indépendants qui travaillent seuls et sans volonté de recruter du personnel.
Ils sont trop souvent dans une situation inégalitaire, c’est une réalité. Mais, certainement pas en escamotant les concepts (indépendants solo = faux indépendants) pour faire croire qu’il n’y a que les salariés qui soient protégés.
Négativement
Cet avis fournit plutôt la preuve qu’il est temps de revoir la législation concernant cette commission. Force est de constater que ses avis sont rares (28 en 2016, 17 en 2015), souvent pour se déclarer incompétente (7 cas sur 28 en 2016) et qu’elle ne contribue pas vraiment à apporter des réponses satisfaisantes.
Pour l’UCM, la distinction entre salarié et indépendant doit se baser sur des critères clairs et définis dans la loi. De plus, la figure voulue par les parties au contrat ne doit pouvoir être renversée que s’il y a abus manifeste de la situation au profit de l’une ou des deux parties.
En savoir plus :
- Notre précédent article sur la situation de DELIVEROO : DELIVEROO du mal
- Notre position sur l’évolution du statut d’indépendant : Le statut social des indépendants : bien renforcé depuis 50 ans !
- Notre position sur la distinction salarié-indépendant : Indépendants, salariés, la frontière invisible